Imputabilité et organisation en écosystème pour la conception de produits de consommation

Il y a des sujets sur lesquels il est bon de ne pas trop commenter parce qu’ils sont tabous. C’est le cas de la responsabilité de l’échec. C’est pourtant sur ce point précis qu’échouent bon nombre d’entreprises supposément « innovantes »: l’échec est la faute de personne. Comme la faute n’est à personne, on peut corrompre l’organisation. Il importe de savoir que l’intégrité organisationnelle est un facteur clé recherché par les investisseurs parce qu’elle offre un terrain propice à l’innovation, comme je l’ai écrit dans mon billet « De l’intégrité à l’innovation ».

Imputabilité

Dans le cours Législation de la consommation de mon certificat en sciences de la consommation, je me souviens d’avoir longtemps réfléchi à la nature de la responsabilité de l’échec pour la conception d’un produit de consommation. En effet, j’y ai appris qu’on a parfois cherché la faute et blâmé une suite d’intervenants après une erreur dans la fabrication d’un objet: des distributeurs, aux manufacturiers, en passant par les concepteurs et les machinistes! Comme je ne suis pas avocat, je vais vous éviter des recommandations qui pourraient être jugées de dépassées dans le futur et je vais simplement aller au point qui m’intéresse: la notion d’imputabilité.

Imputabilité (Wikipédia):

L’imputabilité est une notion juridique qui exprime la possibilité de faire appliquer quelque chose à quelqu’un d’autre ou à quelque chose d’autre.

Il est bon d’ordonner dès le départ la chaîne des responsabilités dans un projet de sorte à savoir toujours qui a le dernier mot et à qui revient ultimement la faute si le gâteau ne lève pas. Ça se fait par écrit. Ça évite bien des maux de tête. Ça se présente avec un organigramme ou une infographie. Ça permet de clarifier les positions hiérarchiques, ce qui peut accélérer le processus et éviter des erreurs coûteuses.

Comme designer, j’ai fais des ententes à contrats qui stipulaient très clairement à qui revenait la faute sur tel ou tel aspect du projet. Dans tous les cas, je convenais avec le manufacturier de la notion d’imputabilité avant même d’avoir tracé une seule ligne. Je pense que les meilleurs projets de design sont issus des meilleures ententes consensuelles. Il y a certains designers qui diront que le rapport idéal « designer-entreprise » en est un de proximité, de professionnalisme et d’écoute mutuelle.

Il est bon aussi de se doter d’un « vérificateur général », dont le but dans le conseil d’administration, est de critiquer férocement les points faibles d’un développement de produit. De mon côté, je recommande qu’on passe une journée « en jeans », qu’on fasse le ménage et qu’on s’installe une War Room, une salle de brainstorming intensif, durant laquelle on explore tous les scénarios catastrophes possibles et envisageables. Cette méthode de développement de scénarios, vous pouvez l’explorer davantage en combinant deux bouquins formidables sur l’organisation:

Organisation en écosystème

Je crois que le modèle de l’organisation en écosystème convient davantage à la création en général. C’est ce modèle qui indique que les cadres de l’entreprise sont entourés d’une multitude d’intervenants cherchant tous un équilibre dans la chaîne des décisions à prendre. Ce type d’organisation qui n’est pas pyramidal, mais circulaire, a l’avantage de distinguer les intervenants du projet non pas par leur chèque de paye, mais bien par le niveau de risque qu’ils ont à s’impliquer dans le projet et par le niveau de performance qu’ils ont dans l’environnement de la conception de produits. Ainsi, le machiniste d’expérience qui adore bricoler a une plus grande place dans la hiérarchie de cet ecosystème que le simple ouvrier ou même que le cadre qui juge lui-même ne pas avoir de talent dans les domaines créatifs. Le comptable à l’oeil aiguisé peut être tout aussi utile que l’ingénieur très créatif. Ultimement, ça prend un big boss qui accepte de prendre la décision finale. Le chiffre 13 semble magique à cet effet: 12 cadres apportent un à un leur critique constructive et un chef prend la décision finale. Le défaut de ce modèle organisationnel est qu’il faille nécessairement passer par une période durant laquelle les forces de chacun sont testées afin de comprendre où ils se situent par rapport aux autres. Il est donc pertinent de clarifier dès le départ les critères mesurés: adaptabilité, créativité, esprit critique, amabilité et humilité, voilà des qualités recherchées dans un tel écosystème.

via steal this meme

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